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— Je n’ai pourtant pas changé… ou si peu… Je n’avais tout simplement jamais cru aux contes de fées…
***
(suite)
Mardi…
— Bonjour Jean! Regardez ce que j’ai reçu ce matin…
Eva lui tendit une carte postale qu’il prit aussitôt et lut immédiatement le bas de la carte pour y voir le nom de son correspondant. La carte était signée par un certain Madre.
— C’est ma mère qui m’écrit d’Espagne… Elle est en tournée avec sa troupe de théâtre… Vous avez déjà visité ce beau pays ?
Elle n’attendit même pas sa réponse qu’elle poursuivit dans son emportement.
— C’est tellement joli là-bas avec tous ces petits villages, les Pyrénées et leur neige éternelle… C’est le seul endroit que j’ai eu la chance de visiter à part la France bien sûr, et c’est probablement de là que me vient une grande partie de mon engouement pour les voyages… Ma mère m’envoie des cartes postales comme celle-ci depuis que je suis toute petite… J’ai beaucoup voyagé à travers ses yeux et je me souviens encore des crises que je faisais quand elle devait nous quitter pour quelques semaines et que moi, je devais rester… C’est mon père qui devait alors subir mon caractère de princesse, dit-elle en riant.
Monsieur Coton l’écoutait attentivement. Il était toutefois soulagé de savoir que la carte provenait de la mère d’Eva et non d’un de ses admirateurs.
L’énergie de la jeune femme fut encore plus palpable qu’à l’habitude dans le restaurant. On aurait dit que toute la scène se déroulait dans un grand théâtre et que les autres clients faisaient eux-mêmes parti de la pièce. Il la regarda s’éloigner pour prendre la commande à une autre table et c’est à cet instant précis que le véritable tournant de sa vie s’effectua.
Il vit alors la chaîne du pendentif d’Eva-Nescencia se briser.
Tout se passa comme au ralenti. Il eut même l’impression d’avoir assisté à l’ultime fraction de seconde où les atomes de la chaîne s’étaient séparés les uns des autres, laissant le bijou se dérober du cou de la belle dame comme un animal à qui on vient de rendre la liberté.
C’est au sol que le pendentif se retrouva, bondissant tout près de lui. Monsieur Coton aurait aimé crier, mais la salle bruyante aurait empêché Eva d’entendre sa maigre voix qui avait figé son nom dans un appel silencieux. Elle continua sa route vers la cuisine avec le même entrain qu’il lui connaissait sans avoir remarqué que son précieux bijou venait de réclamer sa liberté.
« Il faut s’attendre à tout et surtout à l’inattendue » (L’angoisse du roi Salomon)
Monsieur Coton ramassa subtilement le pendentif de sa main gauche et le conserva un long moment dans sa paume comme le souffle d’une intime caresse. Il avait encore le poing serré quand Eva-Nescencia déposa le plat du jour devant lui. Monsieur Coton fit un mouvement vers elle pour lui tendre la main, mais Eva n’aperçut même pas le geste de son client. Elle était déjà repartie vers une autre table, ne laissant qu’un soupir dans la main fermée du comptable.
Monsieur Coton resta momifié sur sa chaise, son cerveau n’était plus qu’une suite d’équations transcen-dantales dont il ne trouvait pas la solution.
Revenant peu à peu à lui, il mit la main à la poche de sa veste et y déposa le précieux pendentif.
Monsieur Coton mangea très peu ce midi-là, son esprit semblait totalement absorbé par tout ce qui venait de se produire un peu plus tôt. C’est d’un timide au revoir qu’il se dirigea vers la porte avec au fond de sa poche, le fameux pendentif d’Eva-Nescencia. Celle-ci lui offrit un magnifique sourire avant qu’il ne quitte l’endroit.
(À suivre)
* Vous avez certainement des gens dans votre entourage qui savourent le silence d'une virgule ou le tumulte d'un point à la fin d'une phrase.
Si les mots sont les mystérieux passants de l'âme, ils ont toutefois besoin d'un regard pour exister...
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