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dimanche 11 juillet 2010

La part des ombres (61 à 63)


Cédrika chantait toujours quand elle sentit une vague présence à ses côtés. C’est en ouvrant les yeux qu’elle vit le jeune homme s’éloigner. Il avait préalablement déposé un mot devant elle, puis une tasse dans laquelle flottait une orchidée mauve sur son lit de crème blanche.

*

(suite)


― C’est tellement captivant de voir à quel point ton visage peut changer d’une journée à l’autre ma petite reine… Octavio faisait tourner délicatement une branche d’orchidées dans sa main et ce mouvement semblait avoir hypnotisé la jeune femme.

― Il est comment en ce moment? Dit-elle en retrouvant ses esprits.

― C’est comme si tes yeux et ton sourire n’étaient pas du tout au même endroit…

Elle fut encore une fois déstabilisée devant la facilité qu’avait cet homme à jauger ses états d’âme. Elle se sentait effectivement déroutée suite aux événements de la veille. Une sorte d’emportement se dessinait sur ses lèvres alors que des questions fusaient de son regard comme elle l’avait si souvent ressenti dans son enfance. Des questions bien grandes pour une si petite fille disait-on à cette époque et le temps n’avait fait qu’accentuer ce trait de caractère qui, d’une curieuse manière, la rendait sans âge.

— Je ne sais pas quoi vous répondre… Tout va bien pourtant…

― Alors je vais prendre pour de l’inattention le bouquet de feuillage que tu viens de me vendre sans y ajouter de fleurs… Octavio se mit à rire de bon cœur en voyant le visage de la jeune femme devenir rouge écarlate comme il lui arrivait si souvent quand elle réalisait une erreur.

― Je suis tellement désolé… Elle reprit aussitôt le bouquet des mains du poète et en moins de deux, elle y glissa des Gerberas qu’elle venait tout juste de recevoir.

― Ton patron a probablement déjà remercié des gens de leurs services pour beaucoup moins que ça, dit-il d’une voix qui ne pouvait cacher son amusement, mais la jeune femme fut incapable d’y déceler la pointe de moquerie et elle se mit à s’excuser de nouveau.

― Je suis tellement gaffeuse… Je m’excuse vrai-ment…

L’homme aux fleurs déposa sa main sur la sienne.

— Arrête Cédrika! Tout est parfait… Je te taquine… Et de toute manière, j’aurais bien pu ne rien dire et me mettre à offrir des branches de fougère… J’aurais simplement changé mes critères pour décider à qui les offrir, dit-il en riant. Mais dis-moi, qu'est-ce qui t’a transporté si loin aujourd’hui pour être distraite à ce point?

La jeune femme plongea ses yeux dans ceux d’Octavio et il l’a senti sans armure alors qu’elle se mit à lui raconter ses péripéties de la veille.

— Si vous saviez… J’ai rencontré un garçon hier!

― Un autre, dit-il avec ironie. Et c’est sensé me surprendre? Je suis certain que c’est à cause de toi si tant d’hommes viennent acheter leurs fleurs ici… Tu devrais voir comme c’est calme quand tu n’es pas là…

Elle fut légèrement intimidée par les propos de son poète préféré, mais Cédrika connaissait cependant très bien son pouvoir de séduction et ce, malgré tous les complexes qu’elle entretenait avec son corps. Elle était même devenue une experte avec le temps dans l’art d’obtenir ce qu’elle voulait. Comment aurait-on pu refuser quoi que ce soit à une femme si belle aux yeux lumineux d’enfance ou à cette adorable petite fille qui savait vous regarder dès son plus jeune âge avec une innocence remplie de cette touche de lucidité si commune chez ceux qui ont longuement vécu.

— Mais cette fois-ci, je ne sais pas comment dire, mais je crois que c’est différent… Il est différent… C’était la deuxième fois que je le se croisais par hasard en quelques jours, mais j’ai la curieuse impression de l’avoir toujours connu… Nous n’avons pourtant échangé aucune parole jusqu’à maintenant… Il m’a seulement offert une orchidée dans une tasse de chocolat chaud et un mot qu’il a écrit sur une serviette de table…

Octavio plongea un instant dans ses pensées.

« Je croyais jusqu’à présent qu’en observant bien les fleurs, on obtenait la preuve que les anges existent bel et bien sur terre à travers le faible battement d’ailes de leur beauté éphémère. Mais depuis quelque temps, je m’éveille auprès de cette femme et j’ai maintenant la certitude que certaines fleurs nous envoûtent à jamais de leur immortel parfum. »

Ses yeux restèrent fixés sur la branche de fleurs qu’il tenait toujours dans sa main, puis…

*

(À suivre)

* Vous avez certainement des gens dans votre entourage qui savourent le silence d'une virgule ou le tumulte d'un point à la fin d'une phrase.
Si les mots sont les mystérieux passants de l'âme, ils ont toutefois besoin d'un regard pour exister...
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Evanescence (page 61à 63)


Monsieur Coton mangea très peu ce midi-là, son esprit semblait totalement absorbé par tout ce qui venait de se produire un peu plus tôt. C’est d’un timide au revoir qu’il se dirigea vers la porte avec au fond de sa poche, le fameux pendentif d’Eva-Nescencia. Celle-ci lui offrit un magnifique sourire avant qu’il ne quitte l’endroit.


(suite)


Arrivé avec plus d’une heure de retard à son boulot et ne sachant pas vraiment ce qu’il avait fait pendant tout ce temps, Monsieur Coton retira sa veste et la déposa soigneusement sur la chaise toujours neuve qui était placée devant son bureau. Il resta ainsi sans bouger, fixant son veston jusqu’à ce que le concierge vienne l’avertir qu’il était plus de 23h00 et qu’il devait bientôt fermer.

Monsieur Coton est maintenant accablé de puissants remords.

Mais qu’a-t-il fait?

Il imagine déjà Eva-Nescencia pleurant la perte de son précieux pendentif et il ressent aussitôt l’urgent besoin d’aller la rejoindre pour la consoler. Il se rend à toute vitesse jusqu’au restaurant où il est accueilli par la noirceur d’une enseigne et un grillage tiré devant la porte. Le Gargantuesque est déjà fermé.

Il marche alors jusqu’à une boîte téléphonique où il commence à feuilleter les 2800 pages du bottin parisien avec anxiété. Malheureusement pour lui, personne n’est inscrit sous le nom d’Eva-Nescencia Dryade. Il se sent totalement désemparé, honteux de ne pas lui avoir remis son pendentif plus tôt.

En contrepartie, avec ce bijou toujours en poche, Monsieur Coton se sent un tout autre homme. Si le livre d’Émile Ajar représente la partie intellectuelle de leur union, le pendentif peut-il illustrer le seul lien physique possible entre eux?

Et comment va-t-il pouvoir s’en départir maintenant?

Monsieur Coton ne dort pas cette nuit-là. Il ressent soudainement la peur du noir dans lequel son esprit a décidé de sombrer tout en éprouvant le besoin d’observer continuellement le bijou qu’il a déposé à ses côtés. Il lutte maintenant contre sa propre conscience et le code moral très strict qui a toujours guidé ses moindres actions.

Doit-il se séparer d’un pendentif qu’il n’a pourtant pas volé?

Celui-ci est tombé par hasard à ses pieds, tel un tison s’envolant du feu.

Monsieur Coton a alors choisi de ramasser cet extraordinaire trésor, quitte à s’y brûler, et il cherche désespérément une justification à son geste. Il n’a plus aucune logique sur laquelle s’accrocher et sent qu’il s’enfonce de plus en plus dans un chemin sans issue.

***

(À suivre)

* Vous avez certainement des gens dans votre entourage qui savourent le silence d'une virgule ou le tumulte d'un point à la fin d'une phrase.
Si les mots sont les mystérieux passants de l'âme, ils ont toutefois besoin d'un regard pour exister...
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