
Les deux jeunes femmes se laissèrent sur cette note, plongeant du même coup Cédrika dans un question-nement existentiel qui retarda beaucoup ses retrouvailles « rêvastique » avec Gabriel.
(suite)
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Toute la ville était maintenant plongée dans une importante canicule et le petit square du centre-ville n’échappait par à cette chaleur surprenante pour un mois de septembre. Le Kiosque aux fleurs était heureusement à l’ombre d’immenses arbres qui bordaient le parc dans lequel se trouvait une très jolie fontaine d’une autre époque. Ce joyau de l’endroit était décoré en son centre par des chevaux de pierre d’où jaillissaient des filets d’eau qui attiraient autant les pigeons que les passants. Ceux-ci étaient toutefois plus nombreux qu’à l’habitude afin de s’y tremper les pieds. C’est là qu’Octavio s’était installé. Il fumait sa pipe en bouquinant à travers les pages d’un livre tout en faisant clapoter l’eau avec ses orteils. En l’observant de près, on pouvait très bien voir la quiétude qui semblait occuper le moindre espace de son visage alors qu’il levait parfois les yeux de son bouquin simplement pour ouvrir une porte sur tout le reste.
Cédrika était pour sa part fidèle à son poste, mais l’homme aux fleurs resta en retrait, comme une simple couleur dans un tableau. Il put ainsi apercevoir l’arrivée du fameux Gabriel. Il n’aurait pu expliquer pourquoi, mais dès son apparition dans le square, il avait su que c’était lui. Le jeune homme semblait tanguer comme un voilier en pleine tempête et avait préféré reprendre son souffle en s’assoyant sur un banc que le poète utilisait souvent pour offrir ses fleurs. De là, il put contempler Cédrika et lentement apprivoiser le moment de leur rencontre. La jeune femme confectionnait des bouquets de Gerberas à l’ombre d’un Tilleul. Gabriel resta longtemps ainsi à l’observer, mais à un certain moment, Octavio le vit s’essuyer le front, remettre ses lunettes soleil, puis avancer vers elle en feignant une noncha-lance dans son attitude qu’un spécialiste en scène de crime aurait tout de suite jugée suspecte. On le sentait nerveux, mais la réaction de Cédrika désamorça toutes les bombes de ses appréhensions. Elle lui sauta au cou sans aucune retenue et celui-ci se mit instinctivement à tourner avec elle comme une girouette sous la puissance d’un vent qui pendant une fraction de seconde, les avait poussé hors du temps.
Octavio ferma son livre, salua discrètement les pigeons en retirant son chapeau et en inclinant un peu la tête, puis il sortit une fleur de son sac qu’il déposa avec douceur sur l’eau de la fontaine. Il regarda son faux nénuphar s’éloigner un moment, puis quitta à son tour le parc par un des nombreux sentiers de gravier.
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(À suivre)
Vous avez certainement des gens dans votre entourage qui savourent le silence d'une virgule ou le tumulte d'un point à la fin d'une phrase. Si les mots sont les mystérieux passants de l'âme, ils ont toutefois besoin d'un regard pour exister... Si vous aimez cette histoire, vous n'avez qu'à cliquer sur ( Email to a friend) situé tout juste en bas de ce texte pour le partager et n'ésitez pas à laisser un commentaire sur le blog. J'adore vous lire!
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