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vendredi 17 septembre 2010

Evanescence (page 130 à 133)


IV



(dernière partie)


Le lit d’Eva était recouvert de feuilles et de photos qu’elle avait éparpillées un peu partout autour d’elle.

Elle se sentait très mal et surtout enragée, comme si on venait de la gifler violemment sans qu’elle ne puisse réagir.

Quelqu’un avait violé délibérément son intimité dans un jeu où elle n’était qu’un simple pion, mais dans lequel était impliqué son plus précieux trésor.

Ses recherches virtuelles l’avaient menée quelques jours plus tôt vers trois hommes avec qui elle avait entretenu une correspondance un peu plus littéraire que les autres et parsemée d’une touche de folie qui aurait pu à la limite se transcender en une telle aventure. Mais comment auraient-ils pu agir ainsi et même connaitre ce détail sur sa vie privé?


*


Le printemps est hâtif cette année. Nous sommes au début du mois de mars et les oiseaux ont déjà réélu domicile dans les arbres bourgeonnants du père Lachaise. Les fleurs embaument l’endroit d’un parfum frais comme un ultime hommage de la vie qui est rendu à cet endroit du dernier repos.

Monsieur Coton n’a pas de livre dans les mains. Il laisse plutôt le chant de la ville border ses réflexions alors qu’il est assis tout près de la sépulture de Chopin tout en caressant le dos de son chat. Il déplie alors la courte lettre qu’il a écrite pour sa mère et se met à la lire à haute voix.

Est-ce que tu sais combien de fois j’ai crié le mot « Maman » dans mon enfance quand je me réveillais en sueur après un des mes éternels cauchemars?

Aucune fois!

Jamais…

Ce mot ne faisait pas parti de mon vocabulaire car à cette époque, je n’allais toujours pas à l’école et je n’avais pas encore compris que tous mes compagnons de classe avaient une mère… Moi, j’avais une nourrice et je la détestais…

Comment aurais-je pu alors comprendre la tendresse autrement que par une interminable quête de perfection dont le but ultime était de séduire mon père et de me faire réconforter dans ses bras… Le mien transportait plutôt d’immenses livres sans images, ou son éternel mallette en cuir qu’il polissait chaque matin avant de partir travailler… J’avais beau m’accroché à sa jambe pour le retenir lors de ces départs, mais jamais il ne m’a prit dans ses bras… Tu me diras peut-être que j’exagère ou que je ne m’en souviens pas, mais de la mémoire, je n’en manque jamais… Je n’ai même pratiquement rien d’autre que celle-ci pour meubler mon univers vide d’affection, mais de toute manière, il y a des gestes qui, au delà des souvenirs, s’imprègnent en nous avec la force d’une enclume… Dans mon cas, je suis resté vierge de lui toute ma vie…

J’ai donc choisit plus tard de plonger dans l’univers des chiffres, mais comment alors humaniser son existence quand on sait très bien que nous sommes seulement le résultat anachronique d’une addition qui n’a aucun sens logique… Pourtant, si on prend une femme et on ajoute un homme, on obtient le chiffre deux, mais parfois, en ajoutant quelques coups de bassin, on obtient le chiffre trois comme résultat final… Mais où est la logique?

Tu as toutefois préféré respecter la rationalité des lois mathématiques et votre union est restée égal au chiffre deux… papa, et moi…

Est-ce que je t’en veux de m’avoir abandonné ainsi?

Probablement beaucoup moins que celui qui fut ton mari, mais aujourd’hui, j’ai décidé de m’inventer un passé et puisque je me dis que tu ne fais probablement plus partie de ce monde, je vais déposer cette lettre au hasard sur un de ces monuments funéraire dont le temps à gruger le nom et sur lequel il ne reste plus que le vert de gris pour conserver les traces d’une vie oubliée… Qui sait si sous cette pierre ne se trouve pas les vestiges d’un cœur de mère… Une mère qui n’a peut-être jamais eu la chance de connaître son enfant…

Peu importe où tu te trouves, je t’aime Maman!

Jean.

Monsieur Coton vient de déposer la lettre sur une pierre tombale et s’assoit un moment près de son chat. Il ressent une profonde lassitude depuis son retour du Japon et après avoir parcouru tants de kilomètres en si peu de temps, il sent qu’il a besoin de repos. Cette pensée provoque toutefois une grande tristesse en lui.

Il sort alors une autre lettre de sa poche et l’a regarde avec consternation. Comment trouvera-t-il le courage d’expédier celle qu’il tient maintenant dans sa main…

La dernière…


*

(À suivre)

Vous avez certainement des gens dans votre entourage qui savourent le silence d'une virgule ou le tumulte d'un point à la fin d'une phrase. Si les mots sont les mystérieux passants de l'âme, ils ont toutefois besoin d'un regard pour exister... Si vous aimez cette histoire, vous n'avez qu'à cliquer sur ( Email to a friend) situé tout juste en bas de ce texte pour le partager et n'ésitez pas à laisser un commentaire sur le blog. J'adore vous lire!

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