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vendredi 30 juillet 2010

Evanescence (page 63 à 66)


Monsieur Coton a alors choisi de ramasser cet extraordinaire trésor, quitte à s’y brûler, et il cherche désespérément une justification à son geste. Il n’a plus aucune logique sur laquelle s’accrocher et sent qu’il s’enfonce de plus en plus dans un chemin sans issue.

***

Mercredi…

6h55… Monsieur Coton est toujours étendu, dans son lit. Il n’a pas pris la peine d’enlever ses chaussures, ni de se déshabiller avant d’aller se coucher. Son complet fraîchement pressé attend toujours impatiemment d’être libéré de sa housse, mais le temps ne semble plus avoir prise sur cet homme. Même ses cils ne clignent plus. On le croirait mort si on ne portait pas attention au maigre mouvement de la couverture grise qui le recouvre jusqu’à la tête et qui suit le chant de son souffle.

Monsieur Coton participe à une grande symphonie intérieure qui l’a tenu éveillé toute la nuit et qui lui a donné par moment l’impression de pouvoir se détacher de lui-même comme dans un état de somnambulisme. Il est passé par toutes les gammes d’émotions alors que son esprit serpentait entre l’allegro et l’adagio d’Eva-Nescencia.

Ses yeux sont toujours ouverts et il ne cesse de contempler le bijou qu’il a soigneusement installé sur l’oreiller à sa gauche. C’est la première fois de sa vie qu’il partage son lit.

Il reste installé ainsi pendant plusieurs heures après avoir éteint son réveille-matin, seul mouvement qui l’a sorti de sa torpeur jusque-là. Il a pourtant entendu le téléphone sonner à trois reprises, ce qui est plus souvent que dans les six derniers mois réunis, mais il n’a pas réagi. Il sait qu’il n’aurait eu droit qu’au sarcasme d’une secrétaire de la banque ne remplissant que son travail en déplorant son absence, mais si c’était Eva?

Cette nouvelle perspective le rend nerveux. Il finit tout de même par se lever, prend délicatement le pendentif sur l’oreiller qu’il dépose sur la table de cuisine et s’applique avec ordre et rigueur à sa routine quoti-dienne.

Monsieur Coton a pris une décision pendant la nuit : il croit devoir laisser aux lois du hasard le soin de remettre ou non le pendentif à sa propriétaire. Il va donc le porter devant elle.

Comme à l’habitude, il s’habille de son éternel costume gris, mais plutôt que de mettre un nœud papillon, il pousse l’audace à laisser le dernier bouton de sa chemise ouverte d’une manière presque impudique. Il attache ensuite le pendentif d’Eva-Nescencia à son cou et le voilà prêt… prêt à affronter les dieux… du moins, sa déesse...

Il imagine déjà la scène au moment où il se rendra au restaurant à son heure habituelle. Il adoptera une attitude posée, et surtout observera les moindres réactions de la jeune femme. Si Eva découvre alors le pendentif à son cou, il va simplement lui sourire et lui remettre son précieux bijou. Il a même déjà préparé une éventuelle explication qu’il ne cesse de répéter dans sa tête:

« Vous savez que j’aime bien le calcul et en général, je compte le nombre de pas qui me sépare d’un endroit à un autre, bien que parfois, je change ma routine en calculant plutôt le nombre de dalles de ciment sur les trottoirs… C’est justement ce que j’avais décidé de faire hier en retournant vers mon travail… J’avais la tête penchée vers le sol et c’est là qu’au coin de la rue, j’ai soudainement aperçu un bijou qui dépassait à peine d’un amas de feuilles mortes… J’ai cru à une blague, car je n’ai jamais rien trouvé dans ma vie… Je me suis alors penché pour le ramasser en feignant d’attacher mon soulier et là, j’ai tout de suite su que s’était votre pendentif… J’ai voulu aller vous le remettre tout de suite, du moins, j’y ai pensé, mais en consultant ma montre, je me suis aperçu que je n’aurais certainement pas le temps d’arriver à l’heure à mon bureau… J’ai effectivement un emploi du temps très chargé et surtout bien planifié, mais c’est un détail dont je vous reparlerai un jour… Bref, je savais que si je retournais au restaurant, je n’aurais pas le temps de retirer délicatement ma veste et de remplir mon verre d’eau avant 2h30, heure où je dois recommencer mon travail… J’ai donc décidé de venir vous le porter à la fermeture de la banque… Malheureusement, j’ai oublié et ce matin, en vidant mes poches, je vide toujours mes poches avant d’aller porter mon complet chez Madame Bataclan, vous savez la blanchisseuse…

Oui… c’est bien elle…

Alors je vide donc mes poches, car j’ai peur d’y oublier un bonbon, de toute manière je ne mange jamais de bonbon, mais un accident est si vite arrivé, je disais donc qu’en vidant mes poches, j’ai trouvé votre pendentif et j’ai décidé de vous faire une surprise en le portant à mon cou ce midi… »


(À suivre)

* Vous avez certainement des gens dans votre entourage qui savourent le silence d'une virgule ou le tumulte d'un point à la fin d'une phrase.
Si les mots sont les mystérieux passants de l'âme, ils ont toutefois besoin d'un regard pour exister...
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